3 septembre 2009

Rolf Jensen

Rolf Jensen est un homme rassurant, il me parle de Philippe Starck, il en fait des rapprochements audacieux, il le connaît bien, il ne m'en faut pas plus pour avoir les yeux qui brillent, il rapproche objets fonctionnels et fiction, comment faire d’un robot ménager conçu pour presser une orange un objet fictionnel. Comment en faire un tripode, un objet martien, comment se sentir un martien issu d’un roman de H.G. Wells en pressant un orange pour en boire le jus, Rolf Jensen me raconte Philippe Starck, il imagine déjà du jus couler de mes lèvres, j'ai mis un orange à lèvre spécial sanguine. L’objet, un simple pressoir à fruit, va raconter l’histoire d’un tripode martien qui fait gicler son liquide partout sur la planète pour la conquérir, l’humain presseur, le matin au petit déjeuné, tout juste sorti de son sommeil, de ses rêves, tout juste à l’état d’éveil, à demi songeur, fantasmant sur un destin héroïque, tient entre les mains le destin d’une humanité qui a besoin de lui. Se sent-il martien ?
- Vous sentez-vous un peu martienne, Kroïne ? Il a ce ton danois, Rolf Jensen, il m'enseigne la manière de recueillir le jus, c’est la vision de Starck, vous comprenez Kroïne, chacun de ses objets il leur donne une densité fictionnelle, il les rapproche d’une trame narrative déjà existante dans la mémoire à histoires de l’utilisateur, dans la mémoire essentiellement du consommateur occidental. D’ailleurs, ses derniers objets sont destinés aux Chinois, il salarie des conteurs confucianistes, il a même employé le grand sinologue français François Jullien ! Et il vend, Starck est une multinationale de l’objet utile qui raconte une histoire.