5 septembre 2009

Maurice

Hier, je rêvais, repensant à mon premier rendez-vous avec Maurice, je le rejoins ce soir.
Les résultats de la rencontre entre Betty Hill et la psychorencontrologue me sont parvenus. Très intriguants. J'attends de les recouper avec une autre opération à venir pour vous annoncer les résultats. En 1961, l'hypnotiseur Benjamin Simon est en cause, orientant les résultats.
Dès mon arrivée à Lyon, Maurice m'interrogera dessus, même si je sais ses préoccupations très éloignées, il a cette délicatesse. Je lui dirais le mensonge de Betty Hill qui me bouleverse, que j'ai cette terreur d’une rencontre avec des E.T., que si  j'en rencontrais de manière inopportune, sans me préparer, comme se fut le cas de tous ceux qui disent en avoir rencontrés, je mourrais d’une crise cardiaque. Oui, Maurice, j’en mourrais, mon cœur n’y résisterait pas, et je sais que celui de toutes les autres personnes, encore moins préparées que moi, s’étreindrait autant que le mien, vous comprenez Maurice, j’accuse tous ceux que je recherche, tous ceux que j’interroge, de me mentir, de mentir, ou plutôt de n’être pas mort alors qu’ils l’auraient dû. De ne pas mourir à ma place que j’aurais dû prendre. Parce que mourir à ce moment devrait être cette réponse obligée à un évènement si considérable que le corps ni résisterait pas.
Maurice, Rolf Jensen me disait que Philippe Starck avait vu des tripodes martiens attaquer d’autres mondes, que c’est pour lui rendre hommage que H.G. Wells, par anticipation, en avant de la pensée, par saut chronologique, décrit le jus d’oranges sanguines que crachent les tripodes.
- Mais Kroïne, n’est-ce pas plutôt Spielbergson qui ose cette approximation dans son film ? Me dira Maurice.
- Vous savez très bien que je mets tout dans un même plan.
Un plan d’immanence. Un plan de rémanence. Un plan à fonds multiples et cinématographique où se voit dans la même scène plusieurs éléments de la vie inconcevables par l’état de la vie même. Par un jeu de premier plan, second plan, troisième plan, quatrième plan, flou devant puis flou derrière, tous tout net à certains moments, un allant dans le sens chronologique du futur l’autre allant dans le sens chronologique du passé, pendant qu’un troisième continue à être figé dans le présent, et qu’un dernier accélère passé-futur, un même plan… Maurice voulait faire du cinéma un art de la connaissance fulgurante, la pensée se dit mieux avec des images complexes et du son des paroles de la musique, un seul plan de quelques minutes expliquerait mieux la pensée entremêlée de Maurice, une pensée capable de s’accaparer les éléments les plus improbables, qu’ainsi est-il capable de comprendre le parcours de mes recherches, de le rapprocher de Gilles Deleuze tout aussi bien des pragmatistes américains, de quelques poètes devenus inconnus plus ils devenaient vivants, qu’il y aurait une extériorité arrivant là soudain, encore plus extérieurs que des civilisations disparues dont on ne sait rien, extérieurs spatialement, chronologiquement donc, extérieurs à la vie même, Maurice disposant de ses travaux, les incorporeraient sans mal. Sa pensée c’est la légion étrangère.