29 septembre 2009

Je lis Bruno Latour



Bruno Latour est ce grand professeur dont il faut lire les aventures prolixes.
Je lis chacun de ses ouvrages depuis quelques années. Vient de sortir Sur le culte moderne des dieux faitiches, publié par la Découverte.
J'y lis ceci qui m'intéresse au plus haut point :
"Le seul exemple de croyance naïve que nous possédions viendrait donc de la croyance naïve des savants dans le fait que les ignorants croiraient naïvement ? Pas tout à fait, car il existe en effet des ignorants qui miment assez bien l'image que les savants voudraient qu'ils donnent d'eux-mêmes. Les photographes de soucoupes volantes, les archéologues des cités spatiales perdues, les zoologistes sur la trace du yéti, les contactés par les petits hommes verts, les créationnistes en lutte contre Darwin, tous ces gens que Pierre Lagrange étudie avec l'attention passionnée d'un collectionneur cherchent en effet à fixer des entités qui auraient apparemment les mêmes propriétés d'existence, le même cahier des charges, que celles qui , d'après les épistémologues, sortent des laboratoires. Chose curieuse, on les appelle "irrationalistes", alors que leur plus grand défaut vient plustôt de la confiance éperdue qu'ils manifestent dans une méthode scientifique datant du XIXè siècle, pour explorer le seul mode d'existence qu'ils parviennent à imaginer : celui de la chose, déjà là, présente, en attente d'être fixée, connue, têtue. Personne n'est plus positiviste que les créationnistes ou les ufologues, puisqu'ils ne parviennent même pas à imaginer d'autres manières d'être et de parler que de décrire des matters of fact. Aucun savant n'est si naïf, du moins au laboratoire. Si bien que, paradoxalement, le seul exemple de croyance naïve que nous possédions, semble provenir des irrationalistes qui prétendent toujours renverser la science officielle avec des faits obstinés cachés par un complot."
Bruno Latour renverse le point de vue le plus courant. Et il est passionnant. Malheureusement, il s'appuie ici sur la thèse de Pierre Lagrange, dont les bribes de travaux qu'il a publié m'ont plus que réservée. L'action des évènements auxquels il s'intéresse semble le dépasser, Pierre Lagrange ne développe pas, pour l'instant, une pensée claire et déterminée, j'attends toujours de lui son grand livre.

25 septembre 2009

Un nouvel activisme

Karlène et Sonia sont devenues des activistes invisibles sur le réseau Internet. Leurs traces sont effacées régulièrement. Sonia peut apparaître parfois dans les jeux en lignes, sous la forme d’avatar, mais seuls les initiés perçoivent que c’est elle.
J’ai cru voir une fois Karlène, à ce restaurant, il y a quelques mois, était-ce elle ? L’homme en face d’elle était ravi, Karlène sait se mouvoir et apparaître comme une énigme.
Il est devenu évident pour moi, pour Krust également, que l’activisme politique prend une tournure inédite. L’utilisation du corps est ce moyen pratique d’amener de riches potentats économiques à une nouvelle jouissance. C’est la logique même du capitalisme. Des histoires filtrent des prestations bénévoles de Karlène. Son pouvoir de séduction est à la hauteur de l’ambition professionnelle de ces grands patrons.

23 septembre 2009

L'activiste Karl n'existe plus sur le net

Karl est devenu Karlène. N'y a-t-il que moi qui le sache ? Paul Devautour le sait qui traque les traces de Karlène. Karl est devenu Karlène et il a effacé toutes les traces de son activité d'activiste sur le net. Des Net-toyeurs sont intervenus. Ils ont pu prendre le nom de nettoyeurs de blogs. Plus sûrement, Karl a utilisé les services d'une entreprise essentielle : ReputationDefender.

ReputationDefender : 17.4 millions d'euros de CA. Des professionnels au service de votre image virtuelle. Karlène est immaculée. Karl n'existe plus.

22 septembre 2009

Karlène & Sonia

Sonia Wolguelane utilise elle aussi des mots d'ordre, je connais beaucoup d'activistes qui les reprennent en coeur :
Vive la fiction qui nous rend vigoureux !

Il faut rendre le terrorisme économique sexy !
Echangeons nos mots d’ordre !

Transforme-toi en image étrange !

Imagine l’ennemi !

Sonia dit : il n’y a pas de lutte, il n’y a pas d’ennemi. Vous m’imaginez en tueuse alors que je ne fais que baiser. Et les puissants ne résistent pas à mes tenues professionnelles, je réalise le fantasme de chacun. Je ne tranche pas des gorges. Ils dégorgent. J’agite et dans leur moment de faiblesse leur transmet un virus tenace. Je leur transmets un bout d’Afrique, ils s’imaginent tenir une virilité de statut d’ébène, je leur rappelle le principe de réalité. Lorsqu’ils comprennent le prix payé pour une nuit avec moi, ils trouvent cela excessif. Mon geste politique est le seul possible. Tuer est si couteux. Ils ne mourront pas, ils sont riches, mais le traitement est si contraignant qu’il s’agit d’une mort sociale. Oui, je résous votre question à tous : quel comportement avoir ? Quel comportement la personne doit-elle adopter face au monde ? Inoculez-vous la maladie et transmettez-là à qui s’en sent indemne. C’est l’assassinat le plus doux qui n’en est pas un, pour lequel vous ne risquez rien pourvu que vous agissiez en tant que personnage clandestin. La lutte est féminine dorénavant.

Le monde de Sonia est dur.
Le monde de Karlène est dur.
Sonia et Karlène ne se sont jamais rencontrées. Suis-je la seule à faire le lien entre elles deux ?
Effectueront-elles une opération en commun un jour ?

19 septembre 2009

Paul Devautour cherche des traces de Karlène

« Nous deviendrons le fantasme de la femme désirable. Nous ne serons plus Karl mais Karlène. »

Paul Devautour bondit, paraît-il, lorsqu’il lut ce dernier message du blog de Karl. Je savais qu’il suivait les échanges des activistes, à l'instar de nombreux intellectuels engagés dans un travail de référencement artistique.

L'activiste Karl, dans le blog qu'il tenait, envoyait des mots d'ordre. Karl donnait des mots d'ordre avant tout à son usage personnel. Son blog était son thérapeute. Karl, près à se transformer, utilisait ce moyen d’expression pour se sortir de ses anciennes barrières. De ses antiquités.

« Nous ne seront plus accusés. »

« Nous avons une image de nous-mêmes négative. »
 
« Nous nous sentirons mieux après. »
 
« Notre psychologie lutte contre notre retournement. »

« Si je tuerai bien un trader, je baiserai plutôt une blonde. »

« Nous ne sommes pas des professionnels de l’action. »
 
« A la privatisation du quotidien nous répondons par notre amateurisme. »
 
« Nous deviendrons des femmes désirables. »
 
Le dernier message avait si fortement impressionné Paul Devautour qu'il cherche dorénavant les traces d'actions de Karlène.
 
Voilà ce que Paul Devautour propose à Krust : une mutualisation de moyens. Paul Devautour mettra à disposition des entreprises Krustiennes les créations fictionnelles de son école à Shanghai. Krust utilisera son réseau de fictionnaires dans les grandes métropoles à la recherche des objets touchés par Karlène.

18 septembre 2009

J'en termine avec Betty Hill

Ce midi, en mangeant avec moi, Krust se tenait informé de l'expérience que j'ai tenté avec Betty Hill.
Je lui explique que la rencontre que dit avoir effectuée Betty Hill, qu'elle dit avoir subie, ne s'est pas déroulée de la manière dont nous le savons. Et si sa version des évènements qui lui sont arrivés aboutissent à ce récit qu'elle tient, c'est en raison de la langue, c'est la raison de la langue qui s'est exprimée là, parce qu'en 1961 il n'était pas possible que l'anglais dise autrement que ce qu'elle a dit un évènement aussi stupéfiant.
La psychorencontrologue fit un autre récit des aventures extraordinaires de Betty Hill. C’est la première fois que la psychorencontrologie peut afficher un succès aussi significatif. L’ensemble des représentations du phénomène lié aux extraterrestres et aux UFO est à repenser. L’histoire est à réécrire. Notre imaginaire n’est pas adapté aux rencontres.
Je sais dorénavant que je devrais mettre en place des réflexes de pensée, des automatismes imaginaires qui devront être intégrés par des moyens subtils au monde du capitalisme. Coca Cola va être utile. Tous les concepts du marketing et du management de l’être humain vont être utiles.
-Krust, tu devras créer des fictions nécessaires à mon grand projet.

16 septembre 2009

Faire des affaires à Shanghai



Partir pour Shanghai. Passer quelques jours avec Krust. Il a rendez-vous avec Paul Devautour à l'école XiYiTang, afin de finaliser un projet entre fictionnaires.
Préparer une garde-robe surprenante, achats réalisés hier.
Lecture prête pour le voyage, un livre volumineux que je viens de trouver en librairie : La dernière révolution de Mao.
"On ne saurait comprendre la volonté aujourd'hui de la Chine communiste de devenir une superpuissance capitaliste sans en remonter à la source, traumatique : la Révolution culturelle."
J'aime ce qui est gros.
François Jullien m'avait déjà un peu déniaisée sur le sujet. Puis, avant hier, lue très rapidement cette B.D. : Une vie chinoise. La vie d'un petit garçon, dont le père va être prit dans la tourmente de la révolution culturelle.


15 septembre 2009

La langue de Betty Hill n'avait pas la bonne syntaxe

Je comprends désormais le désarroi de Betty Hill. Ce qu’elle avait dit sous hypnose en 1961, n'était qu'une histoire de langue.
Parce que je sais qu'existe cette relation entre la langue occidentalement centrée et la perception de la chronologie.

Il manquait à Betty Hill les éléments conceptuels pour dire ce qui lui était arrivée. Et si les propos de Betty Hill avaient été traduits dans une langue éloignée, une langue minoritaire, la langue glacée des esquimaux ? Se serait-on aperçu de la supercherie ? Betty Hill aurait-elle pu parler dans une langue étrangère ?
Je le sens, la rencontre que dit avoir effectuée Betty Hill, qu'elle dit avoir subie, ne s'est pas déroulée de la manière dont nous le savons. Et si sa version des évènements qui lui sont arrivés aboutissent à ce récit qu'elle tient, c'est en raison de la langue, c'est la raison de la langue qui s'est exprimée là, parce qu'en 1961 il n'était pas possible que l'anglais dise autrement que ce qu'elle a dit un évènement aussi stupéfiant.

11 septembre 2009

Une héroïne Volodinienne

Je relis Songes de Mevlido, le chef d'oeuvre d'Antoine Volodine, je cherche l'étrange et persistante attirance qu'il produit sur les hommes, plutôt qu'elle produit... Sonia Wolguelane.
Je sais Krust un lointain amoureux, et tous les activistes, parce qu'ils l'ont fait exister.
Les activistes l'aident depuis le réel de leurs jeux, et ils l’aiment non pas seulement pour son sens de l’action, non pas seulement pour ses doigts glacées supprimant à coups d’armes létales des ennemis si puissants, non pas seulement pour son sens de l’union groupusculaire, ils l’aiment et ils savent pourquoi, ses pas de chattes remuaient si délicatement son derrière, et c’est souvent qu’elle était devant eux qui la suivaient, et si par erreur, ou pour vérifier leur présence, elle se retournait de profil, sa taille apparaissait dans une minceur exquise, et son pull ainsi tendu révélait une splendide grenade.
- Combien d’entre  nous, jouant avec elle à la guerre, pensions un jour la dégoupiller. Sonia, toujours tu te retrouvais l’actrice involontaire de nos représentations mièvres du corps révolutionnaire.

10 septembre 2009

la langue fixe les chronologies

Je reste en France pour quelques jours encore, les discussions avec Maurice ont été déterminantes pour comprendre l'objet même de mon problème chronologique : comment Rolf Jensen n'était pas mort et comment Betty Hill, elle, l'était déjà.
Je disais à Maurice combien les 4000 langues du monde encombrent notre espace de communication, qu'elles ne comportent intrinsèquement aucune caractéristique de l’utilité la plus coutumière, qu'elles sont le fruit de circonstances impossibles à placer sur un diagramme scientifique correct, tellement de territoires fragmentés par des langues distincts et mutuellement incompréhensibles, alors même que le climat, le mode de vie et les besoins économiques sont similaires. Oui, Maurice, comprenez bien que jamais le darwinisme n’expliquera la profusion langagière de l’humanité. C’est une pandémie cause de nombreuses guerres, une seule langue, oui, et le malentendu humain sera divisé.

- Vous remplacez la division par la division.
- Moins c’est plus ! Vive la fin des langues, qu’en bien même 4000 langues prononçant mon nom seraient propres à produire sur mon corps un évanouissement concupiscant.
- Chaque langue, vous le savez Maurice, a des singularités si fortes que nous perdrions de la pensée à les faire disparaître. Pourtant ma fougue d’un avenir unifié qui établirait l’espèce d’ici vers l’espace et des contrées à explorer, et qui me conforte dans l’idée d’une unification salvatrice, me pousse à militer pour leur fin définitive. Parce que je sais, Maurice, que notre sentiment caractériel du temps, en Europe et dans la vieille Amérique, le temps Occidental est un flux vectoriel. Et je peux aller plus loin, vous savez que notre sens de la causalité par séquence /jusqu’au séquençage du génome ?/ que l’individu dont notre culture historique a fait un statut irréductible, que cela même qui représente notre tout, notre attitude face aux évènements comme notre attitude face à ce qui pourrait advenir des évènements futurs, oui, Maurice, vous savez que tout cela qui est fondamental est indissociable de la syntaxe indo-européenne.
- Maurice, les modèles de syntaxe indo-européenne inscrivent les substrats en nous du passé-présent-futur. Et de la disjonction pronominale entre le moi et la collectivité. Ce qui façonnent notre igloo, pardon, notre habitat commun… enfin, les éléments de la pensée Occidentale. J’en étais là.
- Vous en étiez-là Kroïne, lorsque votre langue a mélangée les histoires du passé, du présent et du futur. Et les outils technologiques qui vous placent dans ce flux d’une information immédiate vous fait à chaque fois les digérer, les transformer, par vos propres capacités à dire ce qui se passe dans le monde. Le prisme de vos aventures est le prisme de votre langue informative, l’anglais par lequel vous parliâtes avec Rolf Jensen est le même que celui qui vient de vous dire son assassina, mais entre temps votre pensée fictionnelle surdéveloppée a fourché votre envie d’aventure, votre soif d’enquête. J’ai bien peur que Rolf Jensen soit assez vivant pour déposer sur votre langue la matière séminale de ses cousins vikings, de retrouver la vigueur des conquérants du nord.

8 septembre 2009

Krust et mon problème chronologique

Je téléphone à Krust la bouche en forme de coeur.
Il m'apprend que Betty Hill est morte en 2004.
Il m'apprend que Rolf Jensen est bien vivant, puisqu'il vient de le quitter, après une longue réunion à Bentonville.
- Kroïne, tu as un problème chronologique. Tu n'arrives plus à stabiliser les informations issus de tes recherches.

7 septembre 2009

Je serai collectionneuse

Maurice a le don de m'inviter dans des endroits miteux, pour l'ennuyer je parle de Rolf Jensen, et pendant cette discussion où j'apprenais à Maurice le don des mets qui glissent sous la langue, tous les plats méticuleux que j'ai lentement ingérés, j'apprend sa mort sur mon flux informatif, reçut à mon oreille par mon portable simultanément, je dis à Maurice : Rolf Jensen est mort. C'est la première fois que ces deux noms furent autant rapprochés.
- Je veux retrouver l’objet manufacturé qui a ouvert le ventre de Rolf Jensen. Maurice, je mènerais une enquête minutieuse, je me ferais collectionneuse.
- Ne se pourrait-il pas qu’il s’agisse d’un défaut de ce tunnel ? Un peu d'embonpoint, un bout de plastique qui rebique et le trou est fait, euh... pardon, le tour est fait.
- L’objet existe c'est certain, j'imagine immédiatement une forme conçue uniquement à cette occasion, les designers sont nombreux, je lui attribue une valeur originelle, les meurtres des historiens du futurs se multiplieront, je veux en collectionner chaque pièce, à la manière dont vous imaginez votre plan de cinéma, je mettrai au point la possibilité de posséder des objets, et qu’importe leurs imaginaires, qu’importent s’ils n’ont pas fait d’actions exactes, ils n’en auront que plus de valeurs, parce que je le sens, ils se sont mis à être dans un état physique d’exactitude, et leur penchant à n’avoir pas réalisés l’action de ce pour quoi ils ont pourtant été l’objet n’en donne une valeur que plus importante.

5 septembre 2009

Maurice

Hier, je rêvais, repensant à mon premier rendez-vous avec Maurice, je le rejoins ce soir.
Les résultats de la rencontre entre Betty Hill et la psychorencontrologue me sont parvenus. Très intriguants. J'attends de les recouper avec une autre opération à venir pour vous annoncer les résultats. En 1961, l'hypnotiseur Benjamin Simon est en cause, orientant les résultats.
Dès mon arrivée à Lyon, Maurice m'interrogera dessus, même si je sais ses préoccupations très éloignées, il a cette délicatesse. Je lui dirais le mensonge de Betty Hill qui me bouleverse, que j'ai cette terreur d’une rencontre avec des E.T., que si  j'en rencontrais de manière inopportune, sans me préparer, comme se fut le cas de tous ceux qui disent en avoir rencontrés, je mourrais d’une crise cardiaque. Oui, Maurice, j’en mourrais, mon cœur n’y résisterait pas, et je sais que celui de toutes les autres personnes, encore moins préparées que moi, s’étreindrait autant que le mien, vous comprenez Maurice, j’accuse tous ceux que je recherche, tous ceux que j’interroge, de me mentir, de mentir, ou plutôt de n’être pas mort alors qu’ils l’auraient dû. De ne pas mourir à ma place que j’aurais dû prendre. Parce que mourir à ce moment devrait être cette réponse obligée à un évènement si considérable que le corps ni résisterait pas.
Maurice, Rolf Jensen me disait que Philippe Starck avait vu des tripodes martiens attaquer d’autres mondes, que c’est pour lui rendre hommage que H.G. Wells, par anticipation, en avant de la pensée, par saut chronologique, décrit le jus d’oranges sanguines que crachent les tripodes.
- Mais Kroïne, n’est-ce pas plutôt Spielbergson qui ose cette approximation dans son film ? Me dira Maurice.
- Vous savez très bien que je mets tout dans un même plan.
Un plan d’immanence. Un plan de rémanence. Un plan à fonds multiples et cinématographique où se voit dans la même scène plusieurs éléments de la vie inconcevables par l’état de la vie même. Par un jeu de premier plan, second plan, troisième plan, quatrième plan, flou devant puis flou derrière, tous tout net à certains moments, un allant dans le sens chronologique du futur l’autre allant dans le sens chronologique du passé, pendant qu’un troisième continue à être figé dans le présent, et qu’un dernier accélère passé-futur, un même plan… Maurice voulait faire du cinéma un art de la connaissance fulgurante, la pensée se dit mieux avec des images complexes et du son des paroles de la musique, un seul plan de quelques minutes expliquerait mieux la pensée entremêlée de Maurice, une pensée capable de s’accaparer les éléments les plus improbables, qu’ainsi est-il capable de comprendre le parcours de mes recherches, de le rapprocher de Gilles Deleuze tout aussi bien des pragmatistes américains, de quelques poètes devenus inconnus plus ils devenaient vivants, qu’il y aurait une extériorité arrivant là soudain, encore plus extérieurs que des civilisations disparues dont on ne sait rien, extérieurs spatialement, chronologiquement donc, extérieurs à la vie même, Maurice disposant de ses travaux, les incorporeraient sans mal. Sa pensée c’est la légion étrangère.

3 septembre 2009

Rolf Jensen

Rolf Jensen est un homme rassurant, il me parle de Philippe Starck, il en fait des rapprochements audacieux, il le connaît bien, il ne m'en faut pas plus pour avoir les yeux qui brillent, il rapproche objets fonctionnels et fiction, comment faire d’un robot ménager conçu pour presser une orange un objet fictionnel. Comment en faire un tripode, un objet martien, comment se sentir un martien issu d’un roman de H.G. Wells en pressant un orange pour en boire le jus, Rolf Jensen me raconte Philippe Starck, il imagine déjà du jus couler de mes lèvres, j'ai mis un orange à lèvre spécial sanguine. L’objet, un simple pressoir à fruit, va raconter l’histoire d’un tripode martien qui fait gicler son liquide partout sur la planète pour la conquérir, l’humain presseur, le matin au petit déjeuné, tout juste sorti de son sommeil, de ses rêves, tout juste à l’état d’éveil, à demi songeur, fantasmant sur un destin héroïque, tient entre les mains le destin d’une humanité qui a besoin de lui. Se sent-il martien ?
- Vous sentez-vous un peu martienne, Kroïne ? Il a ce ton danois, Rolf Jensen, il m'enseigne la manière de recueillir le jus, c’est la vision de Starck, vous comprenez Kroïne, chacun de ses objets il leur donne une densité fictionnelle, il les rapproche d’une trame narrative déjà existante dans la mémoire à histoires de l’utilisateur, dans la mémoire essentiellement du consommateur occidental. D’ailleurs, ses derniers objets sont destinés aux Chinois, il salarie des conteurs confucianistes, il a même employé le grand sinologue français François Jullien ! Et il vend, Starck est une multinationale de l’objet utile qui raconte une histoire.

2 septembre 2009

Betty Hill

Le subterfuge que j'ai imaginé, pour faire dire à Betty Hill la réalité de sa rencontre, se met en place. Demain je lui téléphone, juste avant de partir à Copenhague.
La psychorencontrologue prépare le dispositif.
Mon téléphone a été modifié afin que ma voix prennent les intonations subtiles de qui veut aider, mais de qui souffre également d'un mal inconnu. Un grain dans la voix qui lui ferait se souvenir celle de l'hypnotiseur, sa jeunesse à la chronologie écartelé par un évènement incertain.
Demain, Rolf Jensen sera devant moi, et ma voix ne me sera que d'une utilité négligeable. Je suis excitée, ce rendez-vous m'ouvrira-t-il des optiques majeures ?

1 septembre 2009

Je suis dorénavant là

Je suis dorénavant là.
Je suis dorénavant là.
Je suis dorénavant là.
Pour longtemps.